lundi 18 novembre 2024

Les excuses : "À l'époque les combats ne duraient que quelques secondes"

Aujourd'hui une réflexion que l'on entend souvent : "À l'époque les combats ne duraient que quelques secondes". L'idée derrière ceci est de justifier de ne pas chercher l'historicité parce que sinon les combats seraient trop courts et donc pas intéressants d'un point de vue narratif. Évidemment, c'est utilisé pour se dédouaner de tout effort d'historicité. Penchons-nous donc sur cette affirmation.

On va tout d'abord voir qu'elle est à nuancer en fonction des armes, des époques, et, surtout en regard du danger. Mais on pourra aussi rajouter qu'elle n'empêche pas forcément d'utiliser des coups historiques.

Gravure anonyme publiée en France entre 1615 et 1670
Collection du Rijkmuseum d'Amsterdam

 Les combats duraient-ils vraiment quelques secondes ?

Cette affirmation est à nuancer d'abord par l'expérience des assauts et des sparrings que l'on peut avoir en escrime, en AHME ou même en escrime de GN. Si certains assauts sont résolus très vite, il peut aussi se passer beaucoup de temps avant que quelqu'un soit touché. Il suffit de regarder un match d'épée féminine de haut niveau pour vous en convaincre, au point que l'on a dû mettre en place des règles spécifiques pour inciter à l'assaut comme la règle de non-combativité. Les sparrings de rapière ou d'épée longue peuvent être plus longs que l'on pense avant d'avoir une touche, avec parfois plusieurs phrases d'armes, des dégagements pour se remettre à distance etc. Avec des boucliers c'est encore plus long, car on est plutôt bien protégés.

De plus même les touches considérées comme valables ne sont pas forcément toutes incapacitantes : si un estoc à la tête est assez radical ce n'est pas forcément le cas des entailles, même profondes, ou même des estocs au corps qui vous garantira probablement une mort par infection dans les 15 jours mais peut vous laisser encore capable de continuer à vous battre. Si l'on ajoute les armures, le combat peut vraiment durer longtemps avant que l'un ne soit assommé, vaincu en lutte, ou touché à un défaut de l'armure. Les chansons de geste nous décrivent des combats durant plusieurs heures voire plusieurs jours entre deux chevaliers. C'est évidemment très fortement exagéré mais on est très loin des quelques secondes évoquées ici.

Enfin on oublie un dernier facteur : le risque de mourir. Nos assauts et nos sparrings ne sont que d'imparfaites simulations car nous savons que nous ne risquons pas la mort. Il peut y avoir des stratégies de double touche ou d'afterblow pour "annuler" un coup adverse. Avec des armes pointues on ne s'amuse pas à ça, on ne veut pas être blessé et mourir, on sera plus prudent, on n'attaquera pas n'importe comment, on testera, on se retirera vite si ça ne se passe pas comme prévu etc. Ce facteur fait aussi que beaucoup de combats devaient être bien plus longs qu'on l'imagine, même sans armures avec des armes mortelles.

Lancelot affronte Méléagant - miniature tirée du Lancelot en prose (1440-1425)

Faire durer le combat n'implique pas forcément d'abandonner les techniques historiques

Soyons honnêtes néanmoins, en dehors de cas particuliers (duel en armure notamment), on n'atteindra probablement pas le nombre de coups minimal pour un combat des Championnats de France d'Escrime Artistique (pour 3 minutes : 72 pour les armes lourdes, 81 pour les armes légères et 90 pour les armes très légères). Mais cela ne nous empêche pas pour autant d'utiliser des techniques historiques.

Tout d'abord il y a la forme des coups qui n'empêche en rien d'avoir un combat long : attaques, parades, ripostes historiques peuvent facilement être prolongées. Ensuite on constate en effet que beaucoup de techniques ou de coups dits "de maître" sont fait pour terminer le combat. Mais en général il y a des parades, des contres à ces techniques et les traités d'escrime nous les montrent. Encore une fois, une mention spéciale ici à Paulus Hector Mair et ses traitées des années 1540 qui nous montrent des techniques avec le contre, et, au minimum, le contre du contre, permettant de longs échanges de coups et parades complexes. Il y a donc le plus souvent moyen de s'en sortir.

Alors oui, ça ne sera pas 100% réaliste, parce que, oui on veut du spectacle. Il y aura une probabilité beaucoup trop forte qu'un combattant se soit sorti de situations difficiles, il y aura une probabilité beaucoup trop importante de coups audacieux normalement difficiles à placer, l'escrime sera aussi probablement beaucoup plus propre. Malgré tout on utilisera des techniques réelles, historiques, en accord avec les armes que l'on manie et non pas une sorte de gloubi-boulga moderne. On montrera les armes comme elles doivent être utilisées, comme elles étaient utilisées, on "truque" juste un peu la capacité à se défendre de coups vraiment dangereux.

Le 16e jeu d'épée longue de Paulus Hector Mair avec la technique et son contre. À la fin on imagine bien celui qui a mis l'autre à terre retourner prendre son épée. Le combat peut alors continuer !

***

Voilà donc pour cette excuse dont on a vu qu'elle était tout de même très discutable. Alors, oui, il faut étudier des techniques nouvelles et non refaire à l'épée longue/le sabre/la rapière à lame plate/l'épée de cour etc. ce que l'on sait faire avec une arme à lame triangulaire. Mais si vous changez d'arme, si vous voulez évoquer une époque passée, par pitié, étudiez l'escrime de cette époque et n'invoquez pas l'excuse que ça ne servirait à rien car ça mènerait à des combats trop courts !

lundi 11 novembre 2024

Les excuses : "Utiliser une escrime plus historique c'est dangereux."

Bonjour à tous, ici le Baron de Sigognac pour vous desservir

Aujourd'hui dans les excuses le "MALHEUREUX ! C'EST TROP DANGEREUX !"

Sa place dans les "mauvaises" excuses a de quoi surprendre. Notre premier réflexe serait de l'associer à l'apparition de dangers bien connus : des coups trop forts, peu précis, non maitrisés, à mauvaise distance, la pointe vers le visage… Ce que notre entrainement doit annihiler. 

L'ennui c'est qu'elle est aussi utilisée pour refuser l'usage de techniques plus historiques. Pourquoi ? Parce qu'en réalité ce sont des techniques plus historiques et que ça agace : cherchez pas plus loin, dans quatre vingt dix pour cent des cas c'est juste ça. Cependant cela reste un peu léger, même dans une position d'autorité, donc autant invoquer une excuse bien rodée comme la sécurité. Et c'est malin, il faut l'avouer.  Cela évite ainsi moultes palabres et discussions compliquées.

Après, coup de chance, l'excuse peut s'avérer vraie au final. Alors, utiliser des techniques plus historiques est-ce trop dangereux ? L'auteur nous prendrait-il pas une deuxième fois pour des jambons ? J'ai de nouveau mon avis sur la question.


Sean Bean aussi. Le seigneur des anneaux : La communauté de l'anneaux de Peter Jackson (2001)


Remarque : je fais l'impasse cette fois sur les contraintes de temps et de niveau pouvant justifier une telle excuse, je l'ai déjà fait  dans Les excuses : C'est trop technique ! et je n'ai rien pour l'instant à ajouter.

"Ce sont des techniques faites pour blesser et tuer !"


C'est l'argument principal : les techniques historiques sont faites pour tuer et blesser (gravement). 

Les traités ne manquent pas d'illustrations ou de descriptions présentant les milles et une blessures que les techniques proposées sont censées prévenir, mais aussi infliger. Quitte à tuer. Ce qui se comprend : de nombreuses sources traitent de situations de duels, de défenses civiles etc... 

Il n'en fallait pas moins pour que certains refusent l'usage de ces techniques au nom de la sécurité. Sans justement chercher plus loin. Exemple personnel, ce collègue qui citant Talhoffer... Allez savoir pourquoi, chaque fois que quelqu'un ne comprenant rien à l'escrime médiévale voulait prétendre que si, il me cite cet auteur. Ce collègue citant Talhoffer disais-je, me tenait à peu près le message suivant "Nan mais tu vois bien qu'il montre un coup de pied qui brise la rotule, c'est dangereux, on va pas l'utiliser…"

Passons qu'après discussions avec le Capitaine, il semble que le coup de pied chez Talhoffer est plus haut et que cela correspondrait davantage à du Fiore... l'escrimeur de scène que vous êtes devez sentir qu'une partie du raisonnement gène. 

Pourquoi ? Parce que nous pratiquons une escrime de coopération. Ne l'oublions pas. Qui vise la rotule de son partenaire à la fin ! Simuler, neutraliser une technique n'est pas un élément tabou dans notre discipline . Il s'agit même d'une de ses bases. Et... nous allons développer.



Puisqu'on parle de Talhoffer : Ms.Thott 290.2, folio 122v  (1459). Pensez-vous que le contexte de l'illustration soit celui de la scène ?



Une méconnaissance feinte des fondements de l'escrime artistique, et réelle de l'historique 

Déjà, soulignons que l'escrime de scène vient elle même de techniques "dangereuses". Inspirée probablement de l'escrime olympique, notamment du sabre, les gestes que nous apprenons sont neutralisés. Nous n'avons pas le choix. Prenez une arme affutée, faites un moulinet qui connecte pleine tête, je suis navré mais ça va saigner. Nous pourrions même nous estimer heureux si cela ne faisait que saigner. 
Ne faisons pas mine de l'omettre : les lames non pointues, non affutées, les nombreuses règles de maitrises, distances de sécurité n'existent pas pour meubler. 

Nous sortir ou nous sous-entendre par des actes et déclarations, que l'escrime de scène ne pourrait pas dans ses fondements, ses outils, rendre inoffensives des techniques d'escrime historique me fait doucement rigoler. 

D'autant plus, qu'associer automatiquement l'escrime historique comme uniquement un art de tuer et blesser demeure grossier. 

Lorsque nous recevons des historiens leurs interprétations sur un geste d'escrime, il convient de ne pas oublier le contexte qu'ils développent autour de celles ci. Désolé, scoop, flash spécial, priorité au direct, il semblerait que ne soit pas toujours pour transformer l'autre en brochettes. Même quand ça bagarre.

Prenez la gladiature. Cet art de combat est conçu davantage pour le spectacle que pour blesser gravement : un gladiateur, ça coute cher. Alors tout le jeu aurait été qu'il se batte, ça ok, mais en s'évitant une fin de carrière prématurée. Genre estropié, éventré, tué… Bon ils s'infligeaient de sérieuses entailles de temps  à autres, mais cela indique que même en opposition, certains risques se voyaient neutralisés de façon volontaire, voulue, réfléchie… Bref, ce n'était pas des "sauvages". 

Nous pourrions aussi citer le possible aspect proto-sportif chez Joachim Meyer. Certes, ses techniques semblent efficace en situation "réelle". Cependant, ce n'est pas aussi affirmé que dans le Flos Duellatorum de Fiore Dei Liberi.

Bref envisager l'escrime historique comme un simple art de blesser et de tuer équivaut à taper un peu à côté. Je ne parle même pas de l'influence culturelle qui peut prendre le pas sur l'efficacité des techniques présentées… 

Rigolez, mais c'est avec des idées similaires qu'on en vient sans trembler des genoux à inviter un collègue soi disant calé en histoire pour qu'il affirme que l'escrime commence au XVIe siècle et / ou qu'au Moyen âge les combattants étaient surtout des catcheurs. Je précise tout de suite que je ne parle pas de discours qui se seraient tenus il y à 80 ans, ni même 10. C'est toujours en cours, malgré les évolutions, les nouvelles interprétations et probablement celles futures qui viendront  remettre certaines choses en question.

Du même ouvrage, folio 90v. Si vous avez répondu non, pensez-vous qu'un escrimeur de scène va reproduire ces techniques telles quelles ?


Une volonté de ne pas se remettre en question



Une nouvelle fois, il nous est difficile de ne pas voir dans ce refus une simple volonté de ne pas évoluer. Cette fois sous le couvert de la sécurité. J'en suis le premier navré. 

Je ne dis pas que certaines techniques pourraient ne pas être suffisamment neutralisées, donc à écarter, mais avant de l'affirmer il faudrait déjà avoir pris la peine d'"essayer". Et s'éviter ensuite d'en sortir une généralité. On vous voit vous savez.
Un enchainement qui devrait se finir pointe au visage peut très bien se neutraliser en visant le corps à la place. et pas n'importe où sur le corps bien sûr. Un coup de pied à la rotule peut bien finir à la cuisse etc... 

Refuser des les utiliser voire même de les étudier parce qu'en réalité l'escrime historique vous énerve, vous en avez le droit. En revanche, ce n'est pas en invoquant le danger que le débat va s'arrêter ou que nous n'allons pas développer au fil des années une certaine envie de vous le faire remarquer. 

De même, certains crieront qu'on dénature le geste. Merci, nous sommes au courant que nous proposons un simulacre. Je vous assure que le point nous a pas échappé. Nous cherchons juste quand c'est possible à nous rapprocher du plus "juste". Dans l'état actuel des connaissances et le contexte de notre discipline : la scène. Ensuite, si cet état actuel bouge nous en ferons d'autant.

Nous revenons toujours au même point, à la même difficulté : qu'est ce que scéniquement vous voulez ?

Nous sommes au Fracas des Lames assez claire de notre côté : nous trouvons un vrai intérêt à développer et utiliser une escrime plus historique dans nos créations. Nous nous en sommes jamais cachés. Il s'agit tout de même de la raison qui a poussé le Capitaine à créer ce blog et moi de le rejoindre. Donc surprise, cette position nous la défendons.

Toutefois, je me répète, pratiquer une escrime artistique dépourvue de réalisme ne me dérange pas. Dès lors que vous avez vos raisons. Je le redis de splendides numéros en viennent et surclassent d'autres qui useraient  d'une escrime plus respectueuse des gestes historiques. 

Mais depuis une décennie, l'inverse est vrai aussi et c'est ce fait que certains on du mal à accepter. Quitte dans les cas extrêmes à essayer de décourager le plus de monde possible.
Je rappelle au cas où que c'est généralement dans ce sens que cela intervient : contre ceux qui veulent essayer ou faire apprendre des coups plus histo. 

Tester et comprendre d'autres manières de procéder, loin de vous nuire ne peut que vous valoriser. Vous, mais aussi cet univers artistique que vous avez su développer. Et qu'importe si aucune technique historique n'y est proposée. Arrêtez juste de vous cacher avec ces excuses éclatées.

Comprenez et faites ce que vous aimez. 

C'était le Baron de Sigognac pour vous desservir

A la prochaine. 








lundi 4 novembre 2024

Les excuses : "C'est trop technique !"

Bonjour à tous, ici le Baron de Sigognac pour vous desservir

Aujourd'hui dans la série des excuses parlons du "C'est trop technique !". 

Utilisée contre une proposition de gestes plus historiques, elle sert à justifier le refus de leur utilisation. dans une chorégraphie ou un entrainement. Que ne ferait-on pour garder son bô grand et large couronné. Sérieux arrêtez !

Ce qui amène forcément plusieurs questions. Pourquoi ? Est ce justifié ? Dans quelles conditions ? L'auteur de cette excuse nous prendrait-il pas pour des jambons ? J'ai mon petit avis sur la question. 

Répondons donc à ces interrogations. 

"Tâte de mon excuse maraud !" Le masque de Zorro 1998

Une excuse valable sur le papier.  


Le manque de temps ou la présence de débutants sont deux éléments qui peuvent sincèrement expliquer une réticence à changer son escrime pour quelque chose de plus réaliste. 

Le débutant ne peut appréhender certaine complexité sans se mettre lui et ses camarades en danger. Ce n'est pas de sa faute, il apprend. Forcément, une escrime artistique plus classique nous semble plus appropriée.  Ce, grâce à des grands gestes théâtralisés. J'ai quelques réserves personnelles à ce sujet, comme vous le savez, mais il n'empêche qu'il s'agit d'un argument censé. 

Il en va de même si le temps vient à manquer. C'est trop technique pour le nombre d'heures qu'il nous reste, mais peut être sur notre prochain projet. 

On ne peut guère le reprocher.

CEPENDANT !


Une excuse pratique pour ne pas se remettre en question. 


Imaginons que les personnes concernées ne peuvent pas se prévaloir des arguments précédents : ils ont le temps suffisant et sont suffisamment expérimentés (plusieurs années de pratique sérieuse). 

Une telle excuse ne pourrait signifier qu'un refus par nature. Ce geste plus réaliste serait par essence "trop technique" pour l'escrime artistique. Et rien que par cette phrase, vous vous rendez bien compte que quelque chose ne va pas. 

Trop technique pour quoi ? L'escrime artistique ? Devrions nous comprendre que notre discipline serait simpliste ? Les experts apprécieront. 

Pour qui ? Le public ? Béni celui qui connaitrait tout ses désirs. D'ailleurs, le public les connait-il lui même ? Sans compter que c'est aussi un peu le mépriser.

Et croyez le c'est pas bien de mépriser. D'ailleurs regardez comment il vous juge. Comment il vous méprise. Arthur Pendragon joué par Alexandre Astier dans la série Kaamelott


Reste la dangerosité. Sauf que d'une la technique est forcément neutralisée et que, de deux, ce serait le caractère dangereux qui serait invoqué, non sa trop grande technicité. 

Bref, cela ne tient pas et ne peut s'entendre que comme une excuse pour ne pas étudier ledit geste pour des raisons de confort, ne pas se remettre en question…


Or, malheureusement de ces deux versions c'est celle ci que nous rencontrons. 

Une excuse réellement utilisée pour ne pas se remettre en question.

Si c'est bien par manque de temps ou de niveau n'est ce pas plus simple de le dire ? La réponse va de soi : c'est ce que nous faisons. Je n'ai jamais entendu en quinze ans quelqu'un louvoyer pour me signifier son manque de temps ou le trop grand nombre de débutants. Alors pourquoi se cacherait-il derrière un mantra du style "Trop technique ! Nan ! C'est trop technique.". 

Ça ne marche pas, c'est donc davantage pour exclure l'usage d'un geste plus historique parce que justement plus historique. Parce que cela obligerait comme je le disais plus haut à se remettre en question, sortir de sa zone de confort. Ce alors que l'escrime de scène est en pleine ébullition. Désolé d'y aller un peu fort, mais c'est couillon.


Excuse éclatée, refusée, merci de retourner vous entrainer.


Surtout que vous pouvez ne pas pratiquer une escrime réaliste / plus respectueuse de l'historique / plus typique / crédible... mettez le terme qui vous convient. J'insiste. Rien ne vous y oblige ! De magnifiques numéros continuent de se créer sans égard une seconde sur l'historicité de l'escrime proposée. Et c'est parfait. A partir du moment où c'est compris et assumé. Et dans ce cas désolé nul besoin d'une excuse aussi éclatée. 

C'était le Baron de Sigognac pour vous desservir. 

A la prochaine. 


lundi 28 octobre 2024

Les excuses : "On ne peut pas savoir comment ils faisaient exactement à l'époque"

Aujourd'hui une excuse qui a parfois été invoquée dans les commentaires de mes articles sur l'impossibilité de complètement connaître l'escrime historique. "De toutes façons on ne peut pas savoir comment ils faisaient exactement à l'époque" la suite sous-entendue est donc qu'on peut faire ce qu'on veut vu qu'on ne sait pas ce qui est vraiment historique ou pas. Donc faire des voltes à l'épée longue suivies d'attaques directe aux jambes avant d'enchaîner sur un "huit" (ou une "croix") en tenant son épée comme une hache de bûcheron, faire d'immenses coups de taille à la rapière  etc.

Hé bien attaquons-nous ici à cette excuse un peu facile. Parce que d'abord nous avons quand même un certain nombre de moyens de savoir à quoi ressemblait l'escrime de telle ou telle époque, mais nous avons même aussi les moyens de l'apprendre relativement facilement (du moins la connaissance est assez accessible, après il faut bosser les techniques).

Couverture de La noble science des joueurs d'épée,
traduction française du traité d'A. Paurenfeindt (1538)

Connaître l'escrime historique

L'Histoire étudie le passé à partir de divers types de sources et l'Histoire de l'escrime ou, plus généralement du combat armé suit les mêmes règles. C'est finalement un objet historique comme un autre, comme l'histoire de l'architecture, de la politique, des techniques industrielles etc. C'est un sujet qui a beaucoup été délaissé par les historiens professionnels même si il avait déjà été étudié par quelques pionniers dés les XIXe et XXe siècles. Le développement d'internet à la fin des années 1990 a permis un bien meilleur accès aux traités, une bien meilleure diffusion des transcriptions, des traductions et des études sur l'histoire du combat à travers les âges. C'est ainsi que sont nés les Arts Martiaux Historiques Européens (AMHE), entraînant bientôt la création d'associations et la diffusion à un plus grand public.

On n'étudie pas sans sources et pour l'histoire de l'escrime ou des arts martiaux en général on a trois types de façons d'accéder à la connaissance :

Les traités d'escrime : le plus ancien connu ne remonte pas avant la fin du XIIIe ou le début du XIVe siècle. C'est évidemment la source la plus précise même si ils ne sont pas toujours très clairs pour de nombreuses raisons (codes d'écriture différents, pédagogie pas encore très au point, contraintes techniques etc.). Ils décrivent des catalogues de techniques, parfois aussi des approches du combat plus "tactiques". Notons que, même très clairs, ils ne nous donnent l'escrime que dans certains contextes parfois proto-sportifs et dans les classes sociales assez riches pour se les procurer. On n'a donc pas toute l'escrime mais c'est déjà pas mal et c'est le mieux qu'on puisse espérer.

Les sources secondaires : il s'agit ici d'abord des sources iconographiques (peintures, gravures, dessins, miniatures, bas-reliefs etc.) et littéraires (sagas vikings, romans de chevalerie, récits, sources judiciaires etc.). Ces sources sont précieuses quand on est à des époques où il n'existe pas de traités. Et même à celles-ci elles peuvent compléter, confirmer ou infirmer certaines hypothèses et restent des sources très utiles. Elles sont aussi plus difficiles à manier parce qu'il y a généralement des codes à connaître pour lire une image par exemple (mais ces codes ont été étudiés et ont connus). Elles sont néanmoins de précieuses alliées dans notre recherche de connaissance.

L'archéologie du geste : ici on expérimente le geste, tout comme un archéologue peut expérimenter la fonte du bronze ou la taille de silex. On teste, on regarde ce qui fonctionne ou pas avec les armes d'époque en fonction de principes martiaux et biomécaniques universels mais aussi en cohérence avec le contexte d'emploi. C'est le complément indispensable des deux autres et l'on peut ainsi faire des va-et-vient entre les différentes sources.

Après il faut aussi confronter les sources entre elles et confronter les travaux des différents chercheurs. Et ainsi, avec les années d'étude cumulées des différents chercheurs on peut s'approcher plus ou moins près de ce que c'était que le combat armé à telle ou telle époque, dans tel ou tel contexte. Évidemment, comme toute connaissance, elle peut être soumise à remise en question, à des révisions, parfois radicales. Mais on sait qu'il s'agit d'une connaissance construite sérieusement, pas d'une hypothèse farfelue posée comme ça.

Notre choix ensuite, en tant qu'escrimeurs, c'est de la reconstituer, d'en présenter une hypothèse plausible dans l'état des connaissances actuelles. On dépasse un peu le cadre historique puisque l'Historien ne s'arrête qu'à des certitudes, mais nous, nous voulons montrer, il faut donc se risquer à intégrer aussi les hypothèses plausibles pour avoir une escrime complète. Donc oui, on peut parfois "inventer" des trucs, mais seulement si c'est cohérent avec tout ce que l'on connait déjà.


Oui, il y a même des gens comme ACTA qui font des recherches sur les combats de gladiateurs !

Apprendre et reproduire l'escrime historique

L'étape suivante est d'assimiler cette connaissance. Je vais ici très vite redire ce que j'ai déjà développé dans un précédent article, et aussi dans celui-ci, allez donc les lire si vous voulez la version longue.

Donc pour vous renseigner vous avez évidemment l'option idéale : vous plonger dans les traités, lire ceux qui les ont étudiés, travaillent dessus, échanger avec ces personnes etc. C'est le plus long mais évidemment le meilleur, le plus proche, le plus complet. L'autre option est beaucoup plus facile : regardez les vidéos et reproduisez, ou inscrivez-vous dans un club d'AMHE et apprenez avec un instructeur. Vous ne serez peut-être pas au sommet de la connaissance de telle ou telle tradition ou maître d'armes mais globalement vous apprendrez des choses correctes et pourrez facilement jouer avec elles pour créer des combats chorégraphiés.

L'étape suivante est de sécuriser certaines techniques : remplacer les pointes au visage par des pointes à la poitrine, sécuriser les clefs, les projections, les coups. Là c'est du pur boulot d'escrimeur de spectacle. Il est en général assez facile et ne doit pas être un véritable obstacle pour quelqu'un d'un peu initié.

La dernière étape est de construire votre combat, de façon cohérente, en sélectionnant les bonnes techniques. Les bonnes techniques sont celles que vous aimez, qui s'insèrent bien dans la thématique de vos personnages, de votre scénario, du moment où elles arrivent dans le combat, mais aussi les techniques qui impressionneront vos spectateurs, qui rendront le mieux sur scène.

 

Ici les gens de l'AMHE du Maine vous présentent une vidéo très didactique sur le combat à la dague selon le Codex Wallerstein

***

Ainsi, si l'escrime historique ne peut être absolument connue dans ses moindres détails on a vu qu'il y avait tout de même des moyens d'en avoir une bonne idée. Et ensuite des ressources pour l'assimiler. On peut ainsi construire un combat respectueux de ce que l'on savait de l'escrime de l'époque mais aussi intéressant et spectaculaire. Donc cessez de vous cacher derrière la fausse excuse que cela ne servirait à rien d'étudier une escrime qu'on ne pourra jamais connaître exactement !

lundi 21 octobre 2024

Les excuses : "Ce n'est pas important que ça soit historique de toutes façons"

C'est désormais le tour de se pencher sur une excuse classique : pourquoi faire de l'escrime historique ? Quel intérêt ? Cela n'est pas vraiment important.

Alors, oui, il n'y a pas forcément de prétention historique dans l'escrime de spectacle ou l'escrime artistique. On est là pour faire du spectacle avec des épées. Mais bon, je ne sais pas pour vous mais moi si je fais ça c'est aussi pour me battre "comme les chevaliers" ou "comme les Mousquetaires", donc ça me chagrine que ça ne soit pas trop ça. Mais au-delà de ça j'ai quelques arguments un peu plus étayés : le respect du commanditaire et du public mais aussi, tout simplement, le respect des armes que l'on manie.

"Histo ? Et pour quoi faire ???" Evil Dead III de Sam Raimi - 1994
(parfois le baron m'influence inconsciemment dans mes choix d'illustrations)

Le problème des spectacles dans des lieux historiques

Je commencerai par une première remarque : une bonne partie de vos spectacles se dérouleront dans des lieux historiques, souvent de châteaux d'ailleurs. Vous y représenterez des personnages historiques ou, au moins, des types de personnages ayant existé, vous parlerez d'Histoire donc. Un certain effort de costume vous sera demandé même si vous ne faites pas de reconstitution historique et que votre spécialité c'est l'escrime. Alors justement, votre spécialité c'est l'escrime, donc pourquoi présenter une escrime voire des armes totalement fausses historiquement ? Pourquoi faire n'importe quoi en matière d'historicité alors qu'on vous embauche pour jouer des chevaliers ou des mousquetaires ? N'est-ce pas un certain manque de respect envers l'organisateur de l'événement et même envers le public ? Vous trompez le public en lui présentant une fausse escrime alors qu'il n'a pas toujours les moyens de l'identifier comme telle.

Personnellement cela me pose un vrai problème en matière de déontologie et d'honnêteté. Du même genre que quand un guide vous présente un garde-manger de donjon avec des évents (pour aérer la nourriture stockée) comme une oubliette où ces gens arriérés du Moyen-Âge qui adoraient la torture jetaient leurs ennemis pour les oublier à jamais (coucou le château de Gand et son audioguide écrit par un "historien" tout droit sorti du XIXe siècle !). On trompe les gens, on trompe l'organisateur et on se moque d'eux, le pire étant les groupes qui prétendent expliquer que "oui les chevaliers se battaient comme ça avant".

 

Les Bretteurs de Saint-Jean (Blaise Laporte et Alexis Norindr) au château de Chamerolles en 2023 avec des rapières à lames plates et une recherche d'historicité du combat

Le problème de la logique de l'arme

Au-delà de ça les armes historiques sont faites pour être maniées d'une certaine manière et les manier n'importe comment conduit à faire n'importe quoi. C'était d'ailleurs l'objet du tout premier article de ce blog (il y a plus 6 ans déjà). Si l'on a abouti aux techniques présentées dans les traités ce n'est pas par hasard, c'est le fruit de décennies de maniement, de recherches, d'expérimentation. Alors évidemment, certaines choses sont possibles et ne sont pas dans certains traités, parce que la seule logique de l'arme ne suffit pas à affirmer qu'une technique était historiquement employée. Mais au minimum les techniques présentées fonctionnent avec l'arme qui leur est associée. Elles doivent être votre base pour la comprendre. Autrement ça ne fonctionnera pas, j'ai beaucoup évoqué le problème de la gestion du poids de votre arme : vous ne pouvez, mécaniquement, pas tout faire avec une arme et si vous essayez vous serez d'une lenteur pachydermique. Chaque arme a sa logique, même si il y a des passerelles, et c'est à vous de vous y adapter.

Alors il y a bien sûr la solution d'armes irréalistes comme les cannes légères et les rapières à lame triangulaire frappant de taille mais il faudra une suspension de l'incrédulité plus forte de la part du public pour y croire. Vous pouvez aussi tricher en employant des armes en duralumium plus légères. Pourquoi pas, mais aussi pourquoi ? Réfléchissez au moins aux raisons profondes qui vous font faire ces choix.

 


Bon, je vous remets cette ancienne vidéo, parce que voilà quoi !

***

Voici donc pour cette excuse. J'insiste sur la tromperie dont nous sommes souvent complices avec notre escrime irréaliste. Nous avons de la chance que les professionnels du Patrimoine connaissent aussi mal l'escrime historique sinon nous aurions vraiment du mal à obtenir des prestations et à être crédibles.

lundi 14 octobre 2024

Créer vite : petite fiche méthodologique

Bonjour à tous

Ici le Baron de Sigognac pour vous desservir. 

Lors de précédents articles j'avais pu aborder certains principes que je dégageais pour créer rapidement et surtout éviter le syndrome de la page blanche. Je vous propose aujourd'hui ce court article pour résumer ma pensée dans quelque chose de digeste
Pour cela je me garderai d'expliquer mes prises de positions.
  
Pourquoi ? me diriez vous à juste titre. Hé bien parce que …

Abracadabra "C'est mon approche pédagogique" ! Voilà ! J'ai dit le mot magique, obtenu mon totem d'immunité ! Alors maintenant disparaissez vils faquins et critiques billevesées.

Hum hum ! Dites vous juste que mes affirmations reposent sur des notions que j'ai déjà pu aborder ou qui le seront dans le futur. 

I) Créer un enchainement de cinq offensives simples. 


Pour ce faire sélectionnons des cibles possibles, du moins plus que d'autres, selon la logique de l'arme utilisée.

A) La sélection des cibles. 


Quelques exemples

Epée longue :

Remarque : Les flèches donnent les trajectoires. C'est pas parfait, mais j'ai fait avec les outils que j'avais. 


Hé Oui !  Pas de jambes et je propose de cibler à la place le flanc et le ventre comme sur un enlevé ou un moulinet inversé.






Cible par défaut aka j'ai pas d'idée : épaule non armée si même latéralité, épaule armée si latéralité inversée

Rapière lame plate :


On est sur du classique. Ho si vous vous le demandiez, il s'appelle Robert.



Cible par défaut : tête ou estoc

Epée de cour


Le cercle montre un jeu d'estoc plus varié. Il se prénomme Jean-Eude au fait.  



Cible par défaut : estoc au dessus du nombril

Question courante : est ce un problème si j'ai vraiment pas d'idée et que je sélectionne cinq fois la cible par défaut ?

Réponse : non. 

Répartissons maintenant

B) Répartition des cibles


En soi vous avez le choix, mais en l'absence d'idée je vous conseillerai de ne jamais dépasser 2 offensives pour le même escrimeur. Au delà, prévoyez de justifier ça scéniquement ou techniquement.

Soit des répartitions : 1-1-1-1-1 ; 1-1-2-1 ; 1-1-1-2 ; 1-2-2 ; 1-2-1-1...

Note :  chaque "-" symbolise un changement d'attaquant. 

C) Tester en déplacement linéaire. 


Vous pouvez travailler de pied ferme au début, mais l'objectif est dans un premier temps de tester l'enchainement en déplacement  linéaire soit en avant et en arrière. 

Devant la diversité proposée (marche, fente, passe, changement de garde etc...), la logique de l'arme va nous aider à prioriser certains déplacement vis à vis d'autre sans pour autant les exclure. 

Epée longue : changements de garde

Rapière lame plate : passes 

Epée de cour : marche et retraite

Une fois cela suffisamment répété et maitrisé, il nous reste à enrichir tout ceci

II ) Enrichir notre enchainement


Plusieurs possibilités s'offrent à nous. En premier, les attaques composées. 

A) Transformer deux offensives simples en attaque composée


Si vous avez respecté les étapes précédentes vous pouvez décider d'effectuer cette transformation chaque fois que la répartition des cibles affiche au moins 2.

Exemple : 2-1-2 vous permet deux transformations : 1-1-1-2 une seule.  

A vous de décider.  Il en est de même pour la prochaine étape avec les actions aux fers


Enrichir d'accord, mais peut être pas jusque là. Si  ? Verdadera Destreza selon Francisco Lorenz Rada



B) Intégrer des actions aux fers


Je fais volontairement un mix entre les préparations aux fers, les attaques aux fers, les prises de fer...

Certaines sont plus logiques avec une arme qu'avec une autre. D'autres semblent se retrouver tout le temps. Voici une proposition, naturellement fausse, mais que je pense utile pour vous aider à décider : 

Epée longue : pression, battement, opposition et liement principalement,

Rapière lame plate : un peu comme l'épée longue, mais avec plus de possibilité pour des croisés et froissement

Epée de cour : Ce que vous voulez. Notez qu'un enveloppement passerait très bien pour démarquer davantage cette arme des autres. 

C) Intégrer des déplacements latéraux, diagonaux et des esquives.


L'usage d'attaques composées et d'actions aux fers, impose souvent ces types de déplacement, mais c'est toujours intéressant de prendre le temps de se poser et les travailler ensuite. De plus, des déplacements linéaires peuvent demeurer par défaut et il convient désormais de les conserver ou les changer pour d'autres plus latéraux. 

De même vous pouvez convertir certaines de vos parades simples restantes en esquive. 


Là encore, à vous de décider. Attention ! Sans vous stresser puisque tout peut être changé.

III) Changez et répétez jusqu'à être satisfait. 


A ce stade vous pourriez avoir en effet  une certaine idée de ce que vous désirez créer. Que ce soit à travers les personnages, une histoire, des techniques qui vous seraient venues …


La pratique aide à penser. 


Or, toutes vos décisions ne collent pas forcément avec ces nouvelles idées. Qu'à cela ne tienne, changez. Revenez même en arrière si d'un point de vue technique vous devez vous réajustez sur une cible, une technique ou un déplacement...

Ensuite, si vous êtes satisfait, répétez ce processus avec cinq nouvelles cibles, puis cinq autres, encore et encore jusqu'à avoir une chorégraphie qui vous plait. 

Le plus dur ce n'est pas de créer, s'entrainer ou de proposer, mais bien de se lancer et cette méthode, parmi tant d'autres n'a qu'un seule but : vous y aider. 


C'était le Baron de Sigognac pour vous desservir.

A la prochaine. 



 






jeudi 26 septembre 2024

Blindeur contre conquérant. Quelques exemples pour en sortir (vidéo)

Bonjour à toutes et tous, ici le Baron de Sigognac pour vous desservir. 

Comme vous le savez si vous avez vu notre dernière vidéo, le capitaine et moi nous étions retrouvé en mes terres l'an dernier. Ce pour filmer quelques passes lors d'une après midi (3 à 4h). Or si une partie tournait bien autour du thème du "premier coup" nous avions aussi préparé quelques illustrations basiques de ce que peut donner ce sujet avec l'utilisation de profils élémentaires, autres que le classique blindeur contre conquérant pour nos personnages. 
Il s'agit d'une notion que j'avais moi même abordé dans cet article : Profils et archétypes, l'art d'associer vite à ses personnages une escrime adaptée à leur personnalité.

Nous désirions vous en proposer une seconde vidéo et puis, la saison a commencé... continué... s'est terminé... Bref, on a raté le coche, procrastiné, choppé la flemme... glissez la légitime insulte que vous désirez.  
Qu'à cela ne tienne, la vidéo était là, prête, montée et nous n'allions pas ad aeternam la délaisser. Donc, nous sommes heureux avec presque un an de retard, nous étions si jeunes à l'image, de vous la proposer avec son article dédié. Article que vous lisez actuellement et qui servira une nouvelle fois à expliciter et développer notre propos. Ce pour que vous puissiez être à même de vous interroger, tester, améliorer, mais aussi critiquer au plus juste du sujet.

"Que serions nous, si nous ne pouvions pas bitcher ?"
Baron de Sigognac, 23 septembre 2024. 

Une petite mise en garde avant d'aller plus en avant : comme nous sortons du couple classique blindeur / conquérant, des contre-offensives, contretemps  etc... sont parfois utilisés. Donc, ce n'est pas tout de suite pour tout le monde. Merci de ne pas vous surestimer ou de faire les cons. Je m'en sors très bien tout seul. Bisous. 


Contreur Vs Conquérant.

Ce n'est pas le plus simple. 

Dans la première illustration avec les dussacks le conquérant se fait surprendre par le contreur qui profite d'au moins une erreur de main de sa part. Naturellement c'est le contreur qui se voit aussitôt mis en avant. Non seulement, il a réussi avec le même geste à faire échouer l'offensive adverse, mais aussi à blesser scéniquement. Le Capitaine va bien je vous l'assure. De fait, nous pourrions voir un artiste ou un vieux briscard qui sanctionne un escrimeur moins performant ou qui après avoir poussé à bout son adversaire parvint à provoquer son erreur.
Imaginons une brute qui dès le départ se découvre de trop pour exploiter sa puissance ; un athlète qui frustré de se faire contrer depuis trop longtemps décide d'aller toujours plus vite et plus fort.

Cette technique est tirée du traité d'André Paurenfeindt Ergrundung Ritterlicher Kunst der Fechterey (1516), ici une illustration de la version éditée par Christian Egenolff en 1531


Avec la rapière, nous voulions vous proposer une phrase d'armes plus équilibrée. Cette fois-ci le conquérant arrive à user d'un contretemps pour continuer son offensive. Cependant, le jeu de pointe lui interdit d'espérer de rentrer de trop dans la distance, tout comme le contreur, ce qui ramène rapidement l'échange à quelque chose de plus classique. Ce tout en profitant du gain de rythme du premier coup, davantage percutant qu'une simple offensive-riposte. 

Avec les épées longues, plus permissives sur le combat rapproché, la lutte est davantage possible. Après tout, nous avons deux profils qui prennent l'initiative de l'attaque. Cela nous offre plus de possibilités pour casser la distance d'escrime au profit d'autres plus courtes. Ce que nous avons voulu illustrer. 

Naturellement, il ne s'agit là que d'exemples parmi d'autres. Et chacune des propositions faites peut s'adapter à n'importe laquelle des armes présentées. La difficulté repose surtout sur la maitrise des distances et de la sécurité que le profil du contreur impose. Par exemple, inutile de vous lancer si vous ou votre partenaire frappez (trop) fort. Surtout en taille. Encore plus si votre partenaire avance.

Soyez patients, mesurés, et répétez lentement, même si vous estimez en avoir les capacités. Croyez moi on se surestime bien trop souvent. Le résultat vaut ces efforts.


Contreur Vs Presseur


Si avec les rapières, le conquérant avait réussi par son habilité à exécuter un contretemps cela peut  devenir une vrai intention. Soit parce qu'il s'agit du profil principal de votre personnage, salut mon  briscard, soit parce que le conquérant, prend l'information que son adversaire joue le contre et s'adapte.

Ce duo fonctionne bien lorsqu'on montre un personnage soucieux d'engager le combat, mais prudent face un adversaire le mettant au défi de s'approcher de lui. Il est d'ailleurs plus facile à mettre en œuvre que le presseur contre conquérant. De quoi nous encourager à moins s'en priver. Restez tout de même vigilant.

Les styles identiques

Que ce passerait-il si un contreur rencontrait un autre contreur, un presseur un autre presseur etc...
Hé bien ! Pas grand chose. Le blindeur contre blindeur le montre. Au delà de l'aspect comique, nous remarquons bien qu'aucun des deux combattants n'arrivera à engager une quelconque action sans changer son approche. Cela vient de la nature du profil : fermeur, mais aussi défenseur. Il ne peut y avoir de jeu si les deux ferment. Tout comme il ne peut y avoir d'action si les deux ne font que décider de leur défense. Ainsi, blindeur contre blindeur, mais aussi presseur contre presseur et contreur contre contreur sont sur le papier injouables : étant tout les trois soit fermeur et/ou défenseur.
Certes un blindeur peut exécuter une offensive pour provoquer celle adverse, mais nous sommes déjà dans des adaptations.

 


En réalité seuls deux ouvreur-attaquant peuvent créer du jeu sans avoir besoin de s'adapter. Ce que nous avons voulu présenter. La complexité de la manœuvre repose sur la distance : elle doit prendre en compte que les deux partenaires vont gagner sur l'autre. Donc partir de plus loin.
Les attaques diagonales descendantes, Oberhau, brisés... se prêtent bien à ce jeu en s'annulant mutuellement. Souvent dans une position proche d'un engagement, l'impact en plus, les bras davantage allongés sans être tendus. 
Un exercice à l'épée longue pour appréhender cette situation serait justement de prendre sa distance à travers un engagement avant que chaque partenaire n'exécute un grand changement de garde arrière, puis, lentement, un brisé. Sans être parfait, cela reste plus complexe et technique que cela en a l'air, vous devriez avoir déjà une idée de son potentiel : celui de proposer deux corps qui s'élancent l'un vers l'autre.

En terme de rythme et pour un premier coup c'est intense et aide à accentuer des moments forts émotionnellement. Comme la rage.

 
 

Pour finir...

L'ensemble de ces propositions demeure bien sûr optionnel. D'une part parce que nos exemples n'en montrent que la surface et que d'autres part, je me répète, cela n'est pas à mettre dans toutes les mains. Enfin si, toutes les mains, mais uniquement quand elles sont prêtes. L'entrainement, les experts toussa toussa. Toutefois, nous sommes convaincus que cela peut vous éclairer sur les raisons qui rendent parfois un début de combat ou de phrases d'armes poussifs. D'excellentes factures ou non. Nous espérons même que vous aurez envie de jouer avec ces profils pour varier vos visuels et vos rythmes, ce afin de coller le plus possible avec vos personnages et histoires.

C'est en tout cas le sens que nous avons voulu donner à cette vidéo. Naturellement, ne vous sentez pas obligés de faire ce que nous vous proposons. Ni même d'être d'accord. Néanmoins si cela peut vous inspirer ou vous interroger c'est que nos objectifs se sont bien passés. 

C'était le Baron de Sigognac pour vous desservir

A bientôt.  

lundi 22 juillet 2024

Les potentialités insoupçonnées du bouclier

Chose très inhabituelle ici, je vais vous parler d'un de mes projets. Il y a un an de cela nous avons tourné un court-métrage dont j'étais le réalisateur : les 7000 Marches. Toute une série de circonstances ont fait que le projet est finalement sorti en Avril 2024 sur Youtube. Ce court-métrage compte deux combats (on ne se refait pas) et l'un des personnages principaux, Lydia, combat à l'épée-bouclier (enfin fauchon-bouclier plus exactement mais le principe est le même). Or, en revoyant les combats j'ai été agréablement surpris du rendu du bouclier, du récit visuel qu'il racontait, de l'effet qu'il faisait. Je ne m'y attendais pas forcément et je pense que cela mérite d'être souligné car c'est une arme trop peu utilisée en escrime de spectacle, et souvent assez mal. Notons d'ailleurs que j'avais déjà écrit un article sur le sujet il y a bien longtemps. Après une mise en contexte nécessaire, analysons l'effet que rend le bouclier.

Mise en contexte

Le contexte du film

Ce paragraphe résume une partie du film et dévoile des éléments importants de l'intrigue. Si vous avez envie de voir ce film et d'en garder la surprise je vous invite d'abord à le visionner. Soit en cliquant sur ce lien, soit sur la vidéo à la fin de l'article.

Les 7000 Marches se déroule donc dans un monde fantastique plus ou moins inspiré du Moyen-Âge et surtout de deux univers : celui de Skyrim et du Seigneur des Anneaux. Il y emprunte même des personnages : ainsi Lydia est généralement le premier compagnon que vous obtenez dans Skyrim, le personnage de notre film a également quelques traits communs avec Sam Gamegie. Philippe est une sorte de Gollum humain et le Gardien du souterrain évoque une version d'Arachne sous une forme humaine. Lydia sert fidèlement l'héroïne et se méfie de Philippe. C'est elle qui porte le bouclier, d'abord parce que, dans le jeu, son équipement de base comprend une armure et un bouclier. Le ton du film se veut à la fois épique mais aussi assez léger avec de très nombreuses références.

Les deux femmes se retrouvent confrontés à deux combats dans le film. Le premier est un combat contre des brigands rencontrés en chemin. L'héroïne se retrouve à une contre deux tandis que Lydia affronte une brigande imposante armée d'un puissant gourdin manié à deux mains. Ce combat est d'abord là pour mettre en avant les qualités martiales des deux femmes. Montrer qu'il s'agit d'héroïnes sachant se battre et se sortant de cette situation toutes deux sans égratignure. Lydia doit gérer un personnage ayant plus d'allonge et de puissance qu'elle, incarnant presque exactement l'archétype de la Brute dans mes modèles de personnage. Elle doit donc réussir à approcher sans prendre de coup ce qu'elle parvient finalement à faire en gardant son sang-froid après plusieurs tentatives.

Le second combat n'est pas à l'avantage des héroïnes, pourtant à deux contre un face à un personnage surpuissant et aux relents de surnaturel : le Gardien du souterrain. Celui-ci contre toutes leurs tentatives, envoie Lydia contre un poteau, désarme l'héroïne et les deux femmes parviennent à le passer en fuyant au prix de la perte de l'essentiel de leur équipement. C'est finalement le bouclier de Lydia qui permettra de les protéger à la fin. Notons qu'en dehors de la fin c'est encore elle qui attaque le Gardien, qui entre dans sa distance. Selon L'esprit de l'épée elle serait une "ouvreuse", elle a l’initiative de l'action et ne l'attend pas. Il n'y a qu'à la fin qu'elle est "fermeuse" où elle se défend. Voilà pour ces deux combats.

La bande-annonce du film

Le contexte de tournage

Il est important d'évoquer le contexte de tournage pour voir un peu les limites et la distance entre l'idéal recherché et ce que l'on a concrètement réussi à faire. Tout d'abord ce tournage est presque entièrement amateur, seul le chef opérateur est vidéaste professionnel, tous les autres participants, acteurs ou "techniciens" sont amateurs et personne n'est rémunéré. Il n'y a d'ailleurs presque aucun budget et les caméras, costumes et décors sont ceux des acteurs, du chef opérateur, du réalisateur ou de l'association Les Bretteurs de Saint-Jean.

Ce contexte amateur fait que l'on a du composer avec les emplois du temps des uns et des autres pour trouver des dates de tournage ou répéter. Beaucoup de combattants étaient également pris en parallèle par d'autres projets et les combats n'ont pas forcément pu être répétés avec autant de soin qu'un idéal l'aurait exigé. De plus les niveaux des combattants sont assez variables : deux des brigands n'avaient qu'une ou deux années d'escrime, tandis que d'autres (le chef de brigands et le Gardien du Souterrain) dépassent largement les 10 ans d'expérience.

Montage isolé du combat de Lydia et de la Brigande, sans accélération.

Les combats ont principalement été créés par les participants eux-mêmes d'après une sorte de cahier des charges que je leur avait donné. Cependant je me suis tout de même beaucoup impliqué dans le combat de Lydia contre la brigande au gourdin. Pour le combat de l'héroïne à 2 vs 1 je voulais un combat très dynamique et qu'elle gère cette situation sans être véritablement en danger. Dans le combat de Lydia contre la brigande je voulais un combat basé sur la gestion de l'entrée dans la distance de l'autre, sur la gestion d'une adversaire puissante mais plus lente et moins expérimentée. Concernant le combat contre le Gardien des Souterrains je voulais qu'il semble invincible, qu'au moins une des deux soit projetée dans le décor et j'avais envie que le contre du désarmement dans l'épée longue de Fiore soit montré.

Le combat contre le Gardien des Souterrains (sans musique)

Pour le maniement du bouclier, je voulais que Samantha, l'actrice qui joue Lydia, ait un maniement très historique de son arme, en le gardant au maximum devant elle, prêt à la protéger. J'aurais également souhaité qu'elle puisse ne jamais sortir sa main droite de sous son bouclier mais elle n'avait jamais manié cette arme autrement et n'a pas eu le temps d'acquérir ce réflexe.

Les combats ont à chaque fois été tournés d'une traite (ou divisé en deux parties pour le dernier) avec plusieurs prises sous 2 ou 3 angles différents, presque dans les mêmes conditions que pour un spectacle devant du public. Cela permet de garder le dynamisme et de ne pas commencer à un premier coup à chaque fois. Et avec des escrimeurs de spectacle ils sont de toutes façons entraînés à cela.

Malgré toutes ces contraintes je ne suis pas mécontent du résultat de ces combats même si, évidemment, on aurait pu faire mieux. Je me suis d'ailleurs résolu à accélérer légèrement (de 10%), la vitesse des combats contre les brigands pour rajouter plus de dynamisme à l'ensemble. Mais ma grande surprise a été l'effet produit par le bouclier.

Une photo du tournage (oui, tout bon réalisateur se doit de porter une casquette)

Les surprises du bouclier

Première surprise : le son !

Ma première surprise fut le son produit par les coups sur le bouclier. Certes, je savais que cela pouvait être bruyant, pour travailler régulièrement à côté de personnes pratiquant du combat viking je l'avais pourtant expérimenté. Mais je ne m'étais jamais rendu compte à quel point un gourdin ou une épée longue frappant un écu légèrement courbe résonnait. Le son est très fort, au point que, si j'ai pu rajouté quelques sons au montage, je n'en ai jamais eu besoin pour le bouclier. Le son que vous entendez lors des combats est celui de la prise de son, il n'a pas été amplifié. Ce son donne tout de suite une impression de brutalité, d'affrontement, on imagine la violence des coups même si les coups restaient en fait maîtrisés par les combattants et combattantes.

Outre la vidéo où l'on peut évidemment travailler le son comme on veut, c'est surtout pour le combat sur scène ou en extérieur que c'est intéressant. Cela impressionnera très vite le public qui s'inquiétera pour la personne qui porte le bouclier.

Notons que même le son du coup de bouclier est original. Il n'a évidemment pas été obtenu en frappant la tête de l'actrice mais elle met simplement sa main au dernier moment pour produire ce son.

Bong !!!

Le récit du bouclier

Comme dit plus haut, dans les deux combats Lydia utilise essentiellement le bouclier de façon active, en "ouvrant", c'est à dire que c'est elle qui va vers l'adversaire et elle reçoit très rarement ses attaques. À chaque fois elle y va sous la protection de son bouclier qui forme une barrière mobile prête à contrer l'attaque qui ne manquera pas de venir. Une fois qu'un ou deux coups bruyants ont été parés cela souligne l'impression de d'entrer dans une zone de danger encore mieux que si elle n'avait pas de bouclier (alors que le danger serait encore plus grand face à une arme avec plus d'allonge). Chaque fois qu'elle entre dans la distance de danger de son adversaire on le ressent, on attend les coups qui vont pleuvoir. Le bouclier a vraiment cet intérêt de renforcer cette impression.

En défensif le bouclier justifie aussi très bien qu'on pare plusieurs coups facilement. Visuellement on comprend bien que la porteuse de bouclier peut se défendre contre de nombreux coups. Plus qu'avec d'autres armes cela justifie la longueur du combat. D'ailleurs notons que les romans de chevalerie décrivent souvent des combats interminables entre deux chevaliers revêtus de mailles, de heaumes et armés de bouclier. Ainsi, même si on a une impression de danger on sait que la faille ne sera pas si facile à trouver et on guette l'instant où elle pourrait l'être.

Enfin le bouclier permet de faire facilement des charges comme Lydia en fait une dans le combat avec la brigande, profitant d'un contretemps et coinçant ainsi le gourdin de celle-ci pour arriver au contact et utiliser les capacités de son arme plus courte. Le bouclier accentue cette impression de masse lancée en avant et on en imagine bien l'impact. Avec le recul il aurait peut-être été intéressant aussi d’avoir une charge au bouclier contre le Gardien des Souterrains lorsque Lydia vient sauver l'héroïne en difficulté. Cela aurait peut-être rajouté un peu plus encore de dramaturgie mais voilà, on ne pense pas forcément à tout au bon moment.

D'une manière générale le bouclier souligne le souci d'avancer vers un adversaire ayant une plus longue allonge et une arme dangereuse mais il justifie aussi le fait de se défendre. On a une certaine impression d'assaut contre une forteresse qui sert ici totalement le récit des deux combats même si dans un cas il réussit et pas dans l'autre.

Le bouclier, une barrière protectrice

D'autres combats

Pour aller un peu plus loin essayons d'élargir nitre réflexion à d'autre combats impliquant des boucliers.

Les mauvaises tenues du bouclier

Une première chose qui saute au yeux quand on a des notions de comment manier correctement un bouclier c'est que, très souvent, le bouclier est mal tenu. Par mal tenu j'entends le fait qu'il ne protège pas. Martialement un bouclier, qu'il soit à manipule ou à énarme, doit TOUJOURS être devant son porteur (à moins de couvrir sa tête) pour lui offrir au minimum une protection passive. Or, cette notion que la plupart des pratiquants de GN apprennent assez vite, ne semble pas connue de la plupart des cascadeurs ou escrimeurs de scènes qui laissent souvent pendre leur bouclier. Il faut aussi compter ces grands coups qui emportent tout le corps et le bouclier avec et que même Adorea semble pratiquer (je les critique rarement mais là, je le constate) et auxquels mon film n'a pas échappé. Il faut pas mal d'entraînement pour garder en permanence le bouclier devant soi.

Tenu trop bas, l'aspect visuel de protection est moins efficace. Les effets que j'ai annoncé ne fonctionnent pas ainsi car le bouclier ne semble plus se dresser comme une barrière prête à encaisser les coups, à protéger le porteur lors d'un mouvement audacieux d'avancée vers l'espace de danger.

Dans cette vidéo de combats en opposition d'ACTA on voit bien l'importance accordée au fait de garder son boulier bien devant soi quels que soient les gestes adoptés.

 Le bouclier tournoyant, une erreur ?

Une variante très répandue de ce bouclier mal tenu c'est ce que je surnommerait le bouclier tournoyant. Les combattants passent ainsi leur temps à tournoyer après leurs parades au bouclier. Il semble que cela soit quelquechose d'assez répandu dans l'enseignement anglo-saxon. Les boucliers ont alors à peine un aspect défensif. Certes ils servent à parer mais pas forcément plus que si le combattant possédait une autre arme dans sa main gauche. On peut en faire des variantes plus ou moins "dansantes", plus ou moins virevoltantes mais en tout cas cela n'a aucune martialité. Personnellement je ne suis pas très amateur, même en fait dans un contexte non martial, je ne trouve pas l'effet très réussi mais, surtout, je trouve que c'est une sorte de trahison de l'esprit du bouclier. Après on peut aimer et il y a des combats assez réussis avec cette technique malgré tout.

En revanche on perd là encore l'aspect retranchement, l'aspect assaut de forteresse du bouclier lorsqu'il est tenu toujours face à l'adversaire, toujours en protection. Le bouclier virevoltant ou tournoyant ne rend plus du tout cet aspect là et on est totalement dans une autre philosophie que je trouve, du coup, moins intéressante, moins exotique.

Voilà, ça virevolte, ça en met plein la vue, mais ça ne raconte pas la même histoire...

Une proposition : l'invincibilité défensive

On l'a vu, dans mon court-métrage Lydia était essentiellement en position d'ouvreuse, c'est elle qui allait vers l'adversaire pour attaquer ou provoquer une attaque. Il n'y a qu'à la fin du dernier combat qu'elle utilise son bouclier de manière totalement défensive et en réaction aux assauts de l'adversaire.

On ne peut donc que s'interroger de ce que serait un combat avec un personnage maniant un bouclier et qui en ferait quelqu'un donnant l'impression d'être impossible à toucher. Il est fort probable que le bouclier renforcerait cet aspect d'invincibilité, d'invulnérabilité. Je l'imagine plus pour un personnage d'antagoniste mais cela peut aussi fonctionner sur un héros posé d'emblée comme un combattant accompli. En ce cas on peut même l'imaginer affronter plusieurs adversaires en même temps (ce qui, martialement, est une réalité, un bouclier est très utile dans ces situations).

C'est ce qui a été tenté, du moins sur la première moitié de ce combat de Lagerta dans la saison 6 de la série Vikings. Vous noterez qu'elle ne se protège pas assez de son bouclier ce qui, je trouve, amoindrit un peu l'effet, malgré tout elle semble très longtemps invincible avec son bouclier. Invincibilité qui diminue peu à peu lors du combat et que la détérioration progressive de son bouclier symbolise bien. Si ce combat n'est pas parfait il reste très intéressant et original.


 

 ***

Voici donc pour ces quelques réflexions issues d'une agréable surprise et d'une expérience de tournage. Je trouve encore que les boucliers sont sous-exploités dans nos combats ou au cinéma. Dans les cinémas et les séries on voit même trop souvent les personnages s'en séparer pour continuer avec une arme seule, une totale aberration !!!
Il y aurait encore beaucoup d'autre choses à explorer, notamment avec les boucliers à manipule qui permettent d'attaquer avec la tranche du bouclier ce qu'il est presque impossible de faire avec un bouclier à énarme.

En tout cas je pense qu'il faut continuer à creuser l'aspect retranché du bouclier, le sentiment de danger d'une attaque qu'il concrétise bien mieux que toute autre arme. Je ne peux que vous inciter à vous procurer ou à fabriquer un bouclier et à tester par vous-mêmes.

lundi 22 avril 2024

Choisir son épée pour l'escrime de spectacle

Récemment on m'a demandé des conseils en MP sur l'achat d'armes pour le combat de spectacle. Le lecteur m'avait fait remarquer que cela pourrait faire un article intéressant et je sors donc un peu ce blog de sa torpeur pour écrire celui-ci. Rassurez-vous ce n'est certainement pas le dernier article du blog même si les publications sont un peu aléatoires depuis un peu plus d'un an.

Après avoir acheté presque une dizaine d'épées et sabres (et peut-être quinze à vingt armes utilisables pour le spectacle), en avoir manié bien plus et vu des dizaines je pense avoir quelques idées sur ce quoi acheter et où. L'idée est de voir quelles qualités il faut rechercher mais aussi, ne nous le cachons pas, de savoir où trouver de bons rapports qualité/prix. En effet, notre loisir est coûteux mais si l'on peut en diminuer le coût acheter plus d'épées c'est tant mieux.

Je mettrai ici de côté les armes en duraluminium, n'en ayant aucune expérience et en ayant très rarement vu je ne me sens pas en mesure de prodiguer des conseils sur celles-ci.

Nous procéderons en deux étapes. Tout d'abord il faut définir, épée par épée, les qualités que l'on attend d'une arme, ce qui est plus ou moins important pour celle-ci. Et ensuite, fort de cette connaissance, nous regarderons les différentes catégories d'armes disponibles sur le marché pour voir où l'on peut s'orienter pour telle ou telle épée. Ainsi on n'achètera pas forcément sa rapière là où l'on peut acheter un sabre d'abordage.

Nota Bene : vous trouverez en illustration des armes de certains fabricants ou revendeurs. Comme j'utilise leurs images je les cite et j'essaie que cette citation soit pertinente par rapport à mon propos. Cependant je préfère préciser que je n'en tire absolument aucun avantage pécuniaire ou matériel.

Fourbisseur dans l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert
"fourbisseur" dans l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert

Qu'est-ce qu'une bonne épée de spectacle ?

La première question à se poser est de se demander quelles qualités on attend d'une épée de spectacle, de l'usage que l'on va faire de celle-ci.

Attentes générales

Il y a d'abord quelques éléments communs à toutes les armes de spectacle. Une bonne arme de spectacle doit permettre la pratique en toute sécurité. Le minimum est donc qu'elle ne soit pas tranchante (c'est très rare) mais surtout, qu'elle ne soit pas pointue. Ne sous-estimez pas le pouvoir de pénétration d'une épée pointue, il n'y a besoin de presque aucune force pour vous transpercer. N'utilisez JAMAIS une épée pointue en vous disant "je vais faire attention, je n'ai pas eu le temps de la meuler, je maîtrise". C'est une très mauvaise idée.

Toujours pour la sécurité, vous devez pouvoir maîtriser votre arme, donc pouvoir l'arrêter. Cela suppose que l'on va privilégier un équilibre vers la garde alors que dans certaines pratiques non spectacle on cherchera parfois l'inverse. De même, une arme plus légère sera plus facile à arrêter et donc on privilégiera les modèles les moins lourds.

Autre chose, une épée de spectacle doit pouvoir parer. Entre les mains de mauvais escrimeurs qui parent avec leurs tranchants et non en 3/4 pour minimiser le choc, les lames devront encaisser des chocs encore plus puissants. Il faut donc une lame solide, en acier, qui ne cassera pas au moindre choc.

Un mot sur la flexibilité pour dire que c'est en général un facteur négligeable. L'escrime de spectacle s'accommode d'armes très rigides comme d'armes plus souples. Une arme trop rigide peut être cassante et une trop souple gêner certaines techniques mais vous trouverez rarement des armes trop rigides ou trop souples, à quelques exceptions près. Donc ce critère est d'abord une affaire de goût personnel ou d'envie d'avoir une arme polyvalente (pour les AMHE en parallèle par exemple). Sinon une arme capable d'encaisser les chocs suffit.

Les rapières à lame triangulaire

Passons désormais aux catégories d'épées spécifiques et, en premier, l'arme qui est encore (à mon grand désespoir ?), la plus pratiquée, la rapière à lame triangulaire. Il y a assez peu à dire. Il y a les chocs que doit pouvoir encaisser une lame qui n'est pas faite en principe pour une pratique de coups de taille. En dehors de cela on peut essayer d'avoir des lames ou des gardes plus ou moins lourdes mais, au vu du faible poids de base de ces armes, cela ne change pas énormément. Au final c'est surtout l'esthétique et/ou le prix qui jouera parce qu'une lame ou une autre changera assez peu à votre pratique. Tout au plus si vous faites de l'épée de cour (donc de la pointe) privilégier les armes de ce types et évitez les grands quillons qui vont gêner les manœuvres fines (comme les dégagés) de votre partenaire qui risque de se prendre dedans.

Rapière "Cyrano II" de chez Armes Garcia

Les rapières à lame plate

Si l'on veut une rapière qui se rapproche plus d'une véritable arme historique il faut donc passer à la rapière à lame plate. Et là l'équilibre est primordial : votre arme de doit pas être trop vers l'avant sous peine de vous handicaper voire de vous valoir des tendinites. Essayez aussi qu'elle soit relativement légère (ne rêvez pas, vous n'aurez pas l'absence de poids d'une lame triangulaire). Pour ce qui est de la longueur de la lame, à vous de voir mais souvent c'était plutôt des lames d'1m de long, voire plus. Enfin, une chose assez peu connue : la longueur de la fusée. Celle-ci se doit d'être très courte sinon vous aurez du mal avec les mouvements de poignets. Si vous observez les armes historiques vous remarquerez que les fusées sont très courtes. Évidemment ça nuit un peu à l'équilibre mais vous aurez de bien meilleurs mouvements avec une fusée courte (cela va me conduire à aller chercher un jour la scie à métaux pour la mienne d'ailleurs). 

Rapière du début du XVIIe siècle sur le site Royal Armouries (musée de Leeds)

Les épées longues

L'équilibre d'une épée longue joue, là encore, sur sa maniabilité. Mais finalement, plus encore que l'équilibre vers la garde, c'est la longueur de la fusée qui compte le plus. Si vous tenez correctement votre épée (voir notre vidéo) vous avez donc la main gauche (ou droite pour les gauchers) qui se promène sur le pommeau et joue sur l'effet levier. Or, comme le disait déjà ce bon vieil Archimède, plus le levier est long, plus la démultiplication de force est importante. Donc, plus votre fusée est longue, plus vous aurez de levier, donc de force pour faire changer l'épée de direction rapidement, donc de maniabilité. Alors, oui, vous objecterez que les longues fusées c'est surtout le XVe siècle (et le début du XVIe), et même plutôt sa fin et vous aurez parfaitement raison. Donc si vous faite du XIVe, vous devrez accepter d'avoir des armes moins maniables.

Le poids d'une épée longue est aussi important. Évitez de dépasser les 1,5kg, il y a des tas d'excellentes épées en dessous de ce poids et une épée trop lourde vous handicapera, même si on peut toujours compenser avec un bon levier et un bon équilibre mais il y a des limites.

Interprétation d'une épée longue du XVe siècle par Fabrice Cognot

Les épées et sabres à une main

L'équilibre des armes à une main sera d'autant plus important que l'arme est longue. On pourrait presque faire deux catégories : les armes courtes (lame de moins de 70 cm) et les plus longues. Plus l'arme est longue, plus il est indispensable qu'elle soit équilibrée car, contrairement aux épées longues, vous n'aurez pas d'effet levier pour compenser. C'est moins important avec les sabres courts (type sabre d'abordage) ou les coutelas qui sont aussi plus léger. Car là aussi le poids compte vraiment car vous n'avez toujours que votre bras pour l'arrêter ou pour infléchir la direction pour exécuter une technique. Je dirais arbitrairement d'éviter les armes au-delà d'1,2 kg et de privilégier les plus légères.

Sabre d'abordage de la fin du XVIIIe siècle sur le site Royal Armouries

Les types d'armes disponibles sur le marché

Maintenant que nous avons vu ce qu'on attend des armes, voyons ce que l'on peut trouver, et aussi au regard d'un dernier facteur : le prix !

Les lames triangulaires

J'évacue assez vite le sujet des lames triangulaires. Vous en avez de deux sortes : les lames d'escrime sportive et, plus chères (et un peu plus lourdes), les lames "à la mousquetaire". Ces dernières ont, me suis-je laisser dire, été créées pour ne pas casser lors des coups de taille pour lesquels les lames triangulaires ne sont normalement pas prévues. J'avoue que j'ai surtout vu des gens utiliser des lames sportives et que je n'en ai jamais vu casser en plus de 12 ans de pratique. Mais on me l'a rapporté. Donc si vous donnez vraiment de puissants coups de taille avec votre lame triangulaire (pitiez, j'ai l'image en tête, enlevez-moi ça !) achetez une lame mousquetaire (enfin à votre partenaire du coup).

Les armes à lame triangulaires se trouvent chez vos revendeurs préférés et en fait un peu partout.

Épées de cour fabriquées par Feather smallwords

Les armes d'AMHE

Les armes conçues pour les Arts Martiaux Historiques Européens sont probablement les meilleures que l'on va pouvoir trouver en terme d'équilibre, de maniabilité et de solidité. Je vais parler ici d'armes simulant des armes ancienne et non des simulateurs d'armes sportives d'époque : les "feder" qui ont une forme spécifique et qui donneront mal le change en spectacle... sauf pour simuler un entraînement ou une Fechtschule. 

Ces épées ont malgré tout plusieurs défauts dont le premier est la façon dont elles sont encore largement neutralisées. Le plus souvent le bout de la lame est replié sur lui-même en une sorte d'arrondi. C'est très sécurisant mais aussi très moche et ça nuit à la crédibilité de l'arme. Heureusement arrive désormais la pointe "spatulée", beaucoup plus discrète et a priori plus sécuritaire pour la touche, elle devrait donc, à terme, remplacer la pointe repliée. La pointe spatulée de mon épée de côté se voit assez peu. Notons que certains fabricants proposent des options de pointe arrondie ce qui est évidemment l'idéal pour nous (mais si vous voulez aussi faire de l'opposition avec il faudra ajouter un blunt).

Un autre défaut éventuel, plutôt rare cependant, peut être une trop grande flexibilité de la lame. Il est rare que cela soit handicapant, mais cela peut vous gêner pour certaines technique comme le Morhau où l'on prend son épée par la lame pour frapper avec la garde, "telle une hache". Éventuellement des lames d'épée conçues pour les combats de la SCA ("Society for Creative Anachronism") pourraient être trop souples au point de gêner leur maniabilité. Les normes de flexibilité des armes SCA imposent des armes plutôt souples mais ce sont surtout des armes américaines qui sont concernées. Notons que, chez de nombreux fabricants, on peut souvent choisir la flexibilité et donc, pour l'escrime de spectacle, choisissez toujours l'épée la plus rigide.

Un autre défaut des armes d'AMHE est qu'elle ne sont pas toujours très jolies. Même si les escrimeurs aiment avoir de belles épées il privilégient d'abord d'autres points et les armes les moins chères font rarement l'objet d'un effort de décoration. Cela peut être dommage.

Et c'est là qu'on arrive au principal défaut des armes d'AMHE : le prix. Une épée d'AMHE coûte souvent de 1,5 à 3 fois le prix d'une épée de reconstitution historique. On a donc un excellent outil mais il faut y mettre le prix. Cela n'est pas forcément intéressant pour les épées longues parce qu'on en trouve d'excellentes pour moins cher ailleurs mais si vous cherchez une bonne rapière à lame plate ou une bonne épée de côté voire une bonne épée de chevalier à une main (dans les 1 mètre) c'est surtout là qu'il faudra vous tourner. Vous y mettrez le prix mais au moins vous pourrez manier votre arme correctement.

À privilégier pour : rapières à lames plates, épées de côté, épées à une main longues

À éviter pour : rien (mais c'est cher)

Épée de côté "steel generation" de chez Black Fencer

Les armes de reconstitution historique

Il y a en Europe de nombreuses troupes de reconstitution historique et donc un marché pour les équiper en armes. Cela concerne beaucoup le Moyen-Âge (surtout le Bas Moyen-Âge) mais pas seulement. Ces épées sont souvent jolies et présentent souvent un belle diversité de formes dans les gardes, les quillons, les pommeaux voire les lames. Comme les troupes pratiquent le combat les armes sont capables de résister aux chocs et sont neutralisées (pointe arrondies, pas de tranchants). L'équilibre et le poids sont variables, la qualité aussi même si les fabricants d'Europe de l'Est ont en général bonne réputation (je me méfierai plus des Asiatiques ou des Indiens ou Pakistanais même si on peut avoir de bonnes choses chez eux).

En essayant les armes vous trouverez en général votre bonheur : une arme pas trop lourde et plutôt équilibrée. Je vous conseille vraiment d'acheter les armes à un marché d'Histoire, au fabricant, et de ne pas hésiter à en essayer des dizaines (je crois qu'un ami a essayé presque toutes les épées du marché de Compiègne avant de trouver la sienne). Enfin, ceci est surtout valable pour les épée longues, les épées médiévales et beaucoup moins pour les rapières et épées de côté. Je ne crois pas avoir jamais trouvé de rapière ou d'épée de côté vraiment bonne chez ces revendeurs et la différence avec les armes d'AMHE est flagrante tandis que mon épée longue de reconstitution est plus maniable que la plupart des épées longues d'AMHE.

À privilégier pour : épées longues, épées médiévales, sabres, coutelas...

À éviter pour : rapières à lames plates, épées de côté

 
Épée longue en vente chez Armory Marek

Les armes "battle ready"

Dans cette catégorie je range des armes indiquées comme telles sur les sites des revendeurs. Il s'agit d'armes dont je n'ai toujours pas trouvé la finalité mais qui sont présentes en nombre sur ces sites. Contrairement aux armes de décoration elles sont capables d'encaisser des chocs sans casser même si elles sont souvent assez rigides et que leurs lames peuvent marquer. Leur fusée a notamment une âme alors que sur certaines armes de décoration c'est une simple accroche. En revanche elles sont le plus souvent vendues pointues et parfois avec un tranchant un peu plus marqué qu'une arme de reconstitution historique. Néanmoins avec un bon coup de meuleuse ou de lime ce problème est rapidement réglé.

Leur équilibre est souvent assez aléatoire mais il peut tout de même être très correct, notamment pour les sabres courts ou toutes les gammes d'épées assez courtes où, on l'a dit, c'est moins grave. De plus, on trouve certaines armes spécifiques uniquement dans cette catégorie car la gamme d'épées et de sabres est vraiment plus grande que pour les autres types d'armes.

Mais bon, ne nous cachons pas, leur principal avantage est souvent le prix. Parfois en promotion vous trouverez des sabres d'abordage utilisables sous les 100€ et qui "font le travail" la plupart du temps. Pourquoi s'en priver ? Je le privilégierai surtout pour les sabres courts, les coutelas ou les épées "exotiques". J'ai moi-même un petit sabre d'un fabricant indien qui me suit fidèlement depuis des années et dont je suis très content. En revanche évitez absolument tout ce qui se rapproche d'une rapière et j'ai aussi des doutes pour les épées longues.

À privilégier pour : sabres, coutelas, épées exotiques

À éviter pour : rapières à lames plates, épées de côté, épées longues

Kopis grec disponible sur le site Kult of Athena, typiquement une arme difficile à trouver.

 

Sabre du bord du XVIIe-XVIIIe siècle. Il s'agit ici d'une arme "battle ready" déjà modifiée et adaptée par Antik Costume (du coup vous n'avez pas à bricoler)

Les armes impropres

Quelques mots sur les armes à éviter et, en premier lieu les armes de décoration. On les trouve chez les revendeurs mais aussi à pas cher sur les brocantes et autres dépôts-ventes. Elles sont faites pour être accrochées à un mur ou pour parader avec, pas pour se battre. Leur équilibre est souvent infâme et le risque de casse est grand. Évitez-les absolument !

Une dernière catégorie concerne les armes de béhourd. Elle sont forcément solides, elles sont bien sécurisées mais elles sont presque toujours très mal adaptées à notre pratique. Ces armes sont faites pour frapper fort, le plus fort possible de taille. Elles sont donc lourdes et équilibrées vers l'avant pour plus d'impact mais aussi moins de maniabilité, chose secondaire dans la pratique. La seule exception concerne les armes faites pour la pratique du duel selon le règlement HMB (Historical Medieval Battle). Celui-ci se fait à la touche et donc là les combattants recherchent des armes plus équilibrées, moins lourdes, plus rapides. Mon fauchon est l'une de ces armes mais c'est une exception par rapport au reste des armes de béhourd.

 

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Voilà donc pour ce guide d'achat qui, je l'espère, vous sera utile. Les armes restent coûteuses et on n'est jamais ravi de se tromper sur un achat. J'ai trop vu d'armes mal fichues, trop lourdes, pas maniables, surtout dans les épées longues ou les rapières à lames plates et, du coup, d'escrimeurs frustrés de ne pas pouvoir faire ce qu'ils auraient voulu et qui "jalousent" votre épée légère et maniable. Prenez le temps de choisir votre épée, surtout dans les cas les plus délicats comme les rapières ou les épées longues. Pour le reste faites vous plaisir en achetant plein de petits sabres pas chers !