lundi 16 décembre 2024

Les excuses : Je fais comme untel a dit.

Bonjour à tous, 

Ici le Baron de Sigognac pour vous desservir, 

Aujourd'hui je souhaitais aborder avec vous une petite excuse : celle de respecter ou de suivre sans discuter la parole et les visions de son enseignant ou d'une référence de l'escrime artistique. 

A l'instar de ce que le public voudrait Les excuses : "C'est ce que le public veut" une certaine complexité se dégage : appliquer la vision de l'enseignant représente à la fois une étape importante dans notre progression, mais aussi un frein. Et si le premier tombe sous le sens, le second se sous estime souvent. De quoi nous inviter à la vigilance. 

Mais développons. 


"Le Maître d'escrime" de Klaus Härö (2015)

Appliquer ce qui est demandé : une étape indispensable de notre apprentissage.  

Lorsque nous commençons à apprendre nous risquons sans guide de nous perdre dans les différentes notions qui composent la discipline. Pour l'escrime artistique, ils nous seraient faciles, seuls, de nous perdre entre les actions de jambes, de bras, de jeux de scènes... A force de persévérance nous arriverions à progresser, mais au prix d'un manque d'efficacité criant entre le temps investi et les résultats obtenus. 

L'aide d'un enseignant ou d'un groupe de personne qui occuperait cette fonction constitue donc une aide non négligeable. Des méthodes vont nous être proposées, des simplifications, des remédiations, des exercices etc... l'idée est donc de faire confiance et de pratiquer ce qui nous est demandé. Certes des questions peuvent être posés par les pratiquants pour comprendre pourquoi ils font tel geste ou telle exercice, mais ce n'est pas systématique. 

Dans ce contexte, nonobstant le sujet des autodidactes,  les progrès apparaissent plus vite ce qui encourage de continuer pour peu que l'activité plait. L'enseignant enseigne, les pratiquants écoutent, s'améliorent et en soi il est difficile de contester l'efficacité de cette organisation. Encore moins qu'il s'agit d'une étape importante voire indispensable à court, moyen et long terme. Nous ne cessons jamais d'apprendre. 

Or, si on se penche un peu sur les personnes chargées de transmettre, ils seront, je ne vous apprends rien, plus à l'aise et désireux de vous partager les éléments qu'ils maitrisent ou apprécient. Au delà de la technique, l'escrime de scène est une discipline artistique. Plusieurs courants, styles, façons de penser cohabitent. Un enseignant, même désireux d'offrir la vision la plus large possible à ses escrimeurs fera donc des choix pédagogiques qui mettront en avant davantage une manière de faire qu'une autre. Ce qui est normal et réponds aussi bien à  des critères pédagogiques que personnels.

Si on pousse le raisonnement plus loin, il semble même que spécialiser nos élèves, au moins dans un premier temps, demeure plus efficace qu'essayer de les généraliser. Attention cela ne veut pas dire de leur cacher la richesse de l'escrime de scène, juste de ne pas désirer les disperser. 

L'avantage serait d'éviter des moments de confusion et permettre à chacun de progresser en profondeur dans une vision artistique de l'escrime de scène. L'idée derrière est de nous permettre plus tard de mieux faire des parallèles lorsque nous intéressera à une autre façon de faire. 

Cependant, c'est aussi le moment ou nous devenons souvent "autonome". J'entends par là de disposer de suffisamment de compétences et d'expériences pour prendre du recul sur notre pratique et décider en conscience. Que ce soit pour progresser, créer etc... Bien sûr, un enseignant et des camarades à nos côtés nous ferons aller plus vite et plus loin. Toutefois, leur absence n'est plus bloquante comme je le décrivais plus haut 

A ce stade la curiosité devient un atout majeur et se conformer à une vision artistique sans la remettre en question, du moins dans son contexte, loin de nous enrichir comme auparavant, finira tôt ou tard par nous ralentir.


Arya Stark et Silvio Forel, Games of Thrones saison 1 (2011)

Remettre en cause nos connaissances pour mieux les comprendre : un jalon essentiel, mais sous estimé.

Actuellement, si je suis les documents fédéraux, nous nous diviserions en trois grands groupes de niveau : les débutants / novices, les confirmés et les experts. C'est surement discutable, mais parfait pour notre propos. En fonction du niveau, des actions sont autorisées ou non. Le cas le plus emblématique est l'interdiction d'user de contre offensive avant de devenir expert. Le parallèle peut être fait sur le besoin de ne plus appliquer par réflexe la vision scénique de l'enseignant ou la personne qui vous inspire. Si un débutant ou un jeune confirmé aurait intérêt à suivre plus ou moins aveuglément ; le confirmé expérimenté et l'expert gagnerait à s'interroger. Comprenez donc, que ma mise en garde concerne ces dernières catégories.  

D'ailleurs vous pouvez appliquer ce raisonnement à l'ensemble de nos positions. Je ne vais pas reprocher un débutant d'apprendre un enchainement de base et ne pas le remettre en question. Je me sais idiot, mais quand même.

La raison est que pour proposer une vision artistique, il faut créer, pour créer il faut décider et que pour décider correctement il est préférable de comprendre. Pourquoi mon enseignant/référence propose tel enchainement ? Pourquoi ne veut il pas tester telle technique ? etc etc...
Ce besoin devrait donc vous encourager à cerner les autres visions portées à votre connaissance ou en rechercher de nouvelles. Testez vos propres interrogations : on me dit que faire telle technique ne fonctionne pas, est ce vrai ? Suis-je obligé de faire ceci pour que le public comprenne ?  

Bien sûr cela peut aboutir en toute logique à faire vôtre la démarche qui a fondée votre apprentissage. Parce que vous rendez compte qu'elle vous correspond, que ces principes vous conviennent en tant qu'artiste. Je pense même que c'est le résultat le plus probable, surtout si la vision, le courant, le style transmis (mettez le nom qui vous va) est artistiquement solide. 
En revanche la différence s'entendra. Vous ne devriez plus vous contenter de simplement dire "Je fais comme untel m'a dit", mais être aussi en capacité d'expliquer avec conviction. Bref apportez une plus value à vos justifications.
 
Après, ce n'est pas grave si vous n'avez pas envie de réfléchir sur ce sujet. En tant qu'amateur, il est tout à fait louable de ne chercher qu'à s'amuser avec une chorégraphie qu'on vous aurait proposée. Parce que nous préférerons investir le temps de notre activité à croiser le plus possible le fer. Il en va de même pour un professionnel : un enseignant qui n'enseignerait que dans le cadre d'une activité annexe, un "cascadeur" qui se trouverait satisfait à juste exécuter ce qui lui serait demandé et ne développerait aucune autre ambition à côté. C'est louable. 

En contrepartie, si vous vous retrouvez dans l'un des profils du paragraphe au dessus, évitez de venir critiquer le travail d'autres, non pas à cause d'erreurs techniques évidentes, mais uniquement parce que la vision proposée ne correspond à ce que vous avez l'habitude d'entendre et d'exécuter sans discuter. Surtout quand cela concernerait d'autres armes ou époques. Le médiéval au hasard. L'épée longue... "Non ce n'est pas une rapière un peu lourde Robert !" (pardon si vous vous appelez Robert). Il en sera de même de si vous vous offusquez parce que certains remettent en cause le style que vous appliquez, alors que vous même ne  l'avez pas vraiment analysé.
 
***

C'est là dessus que cette affirmation, tout comme toutes les autres excuses que nous avons présentées peut témoigner d'une mauvaise foi :  invoquer l'autorité d'un autre pour couper court à tout débat et ériger une vision comme une vérité indépassable.  Malheureusement, l'ennui de la mauvaise foi c'est de nous empêcher de trouver notre voie. Celle que notre enseignant ou notre référence a trouvé très certainement. Hé si eux l'ont fait, pourquoi pas vous ? 

C'était le Baron de Sigognac pour vous desservir.

A la prochaine.  





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